Le patron des juges antiterroristes forcé de prendre sa retraite

Le premier vice-président Claude Choquet a saisi le tribunal administratif pour pouvoir rester à son poste, ce que lui refuse le ministère de la justice.

A la veille des commémorations de l'attentat commis le 14 juillet 2016 à Nice, c'est une affaire qui illustre la persistance de certaines rigidités administratives, et agite les milieux judiciaires. Le premier vice-président Claude Choquet, juge d'instruction et coordinateur du pôle antiterroriste du tribunal de grande instance de Paris, va en effet être obligé de quitter son poste plus tôt que prévu, et de prendre sa retraite contre son gré. Selon des informations obtenues par Mediapart, le magistrat a engagé courant mai une procédure contre le ministère de la justice au tribunal administratif de Paris, cela afin de pouvoir rester en fonction.

Né en décembre 1950, Claude Choquet avait reçu de son administration l'assurance de pouvoir travailler jusqu'au 30 juin 2018, c'est à dire jusqu'à l'âge de 67 ans et six mois. Il avait été nommé à la tête de la célèbre galerie Saint-Eloi, où sont regroupés les cabinets des juges antiterroristes le 1er juillet 2016 par le président du tribunal, Jean-Michel Hayat, en remplacement de Laurence Le Vert. Selon des sources informées, Claude Choquet s'était alors engagé à rester deux années à ce poste très spécialisé et très exigeant.

Le premier vice-président instruit notamment avec ses collègues les attentats du 13 novembre 2015, du 14 juillet 2016, de Saint-Etienne-du-Rouvray, et plusieurs autres encore. Il a également engagé des nouvelles de méthodes de travail au sein du pôle antiterroriste, inspirées de son expérience dans les juridictions interrégionales spécialisées (JIRS) et au pôle crimes contre l'humanité du tribunal de Paris. Il a notamment impulsé une organisation du travail plus collective, et favorisé la co-désignation de plusieurs juges pour instruire les dossiers terroristes. L'un des enjeux étant de faire oublier les querelles d'égo et le travail solitaire de certaines figures du passé comme Jean-Louis Bruguière.

Mais début 2017, la Direction des services judiciaires du ministère de la justice informe Claude Choquet qu'en vertu des dispositions d'une obscure circulaire, il devrait finalement partir à la retraite dès le 4 décembre 2017 (une mauvaise nouvelle qui a été évoquée par Sud Radio).

Un recours gracieux de Claude Choquet, aussitôt adressé à la Chancellerie, avec une lettre d'appui du président du tribunal de Paris, est rejeté par la Place Vendôme. Du coup, il n'a pas d'autre solution que de saisir la justice administrative s'il veut pouvoir boucler ses dossiers et travailler six mois de plus. Selon un de ses collègues, « il ne s'agit pas d'une question d'argent, car il aurait pu travailler jusqu'en décembre 2019 s'il avait demandé à devenir juge en surnombre, mais cela impliquait de ne plus diriger un service ».

En septembre 2015, c'est le juge d'instruction Marc Trévidic qui avait dû, contraint et forcé,  quitter ses fonctions au pôle antiterroriste. Il avait alors atteint la limite de dix années maximum passées au même poste, et n'a pas eu d'autre choix que de partir au tribunal de Lille comme juge aux affaires familiales.

Michel Déléan


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