Oui, des multinationales financent bien des partis politiques européens

Uber, Bayer ou encore Disney financent les grands partis politiques européens par de généreuses contributions. Une pratique légale, mais qui pose question.

L’omniprésence des lobbys au sein des institutions européennes est de notoriété publique. Le fait que de grandes entreprises privées et des groupements industriels financent directement des partis politiques européens l’est moins.

C’est une réalité qu’a rappelée Marine Le Pen, jeudi 7 mars, sur RTL, en dénonçant le financement par des « lobbys », et notamment par le géant de l’agrochimie, Bayer Monsanto, du « parti d’Emmanuel Macron au Parlement européen », l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ALDE).

Qu’est-ce que l’ALDE ?

L’Alliance des libéraux et des démocrates pour l’Europe est un parti politique européen, qui fédère, depuis 2004, des forces politiques centristes et libérales à travers l’Europe. Avec 68 eurodéputés, il dispose du quatrième plus grand groupe du Parlement européen. Il rassemble notamment neuf députés français, issus non seulement de l’UDI et du Mouvement radical (des partis officiellement affiliés à l’ALDE), mais aussi du Modem, de La République en marche et de Générations citoyens.

L’accusation de la présidente du Rassemblement national (RN) vise plutôt juste, à un détail près : La République en marche (LRM) n’est pas officiellement membre de l’ALDE, même si les deux partis sont très proches et se sont alliés en vue des élections européennes. Mais l’ALDE a effectivement reçu, ces dernières années, d’importants financements de la part de Bayer, Uber, Google ou encore du géant suisse des pesticides Syngenta.

Droit d’entrée

Sur la seule année 2018, ce parti centriste libéral a reçu 122 000 euros de la part de huit multinationales et lobbys. Tous ont payé un droit d’entrée compris entre 7 000 et 18 000 euros pour pouvoir intervenir lors du congrès annuel du parti, organisé à Madrid en novembre 2018, ou lors de colloques.

Des représentants de Bayer et de Walt Disney ont participé à un débat sur « l’avenir du commerce, des investissements et de l’innovation » avec une commissaire européenne, une ministre finlandaise et un député allemand ; Uber et Stuart figuraient dans une table ronde sur « la flexibilité et l’avenir du travail », tandis que le directeur général du lobby de l’agroalimentaire FoodDrinkEurope donnait son avis sur « le marché unique après 2019 ».

    « C’est une pratique courante et parfaitement légale »

Interrogé par Le Monde, Bayer explique avoir cosponsorisé des congrès de l’ALDE pour « faciliter un large débat sur divers sujets tels que l’innovation, l’agriculture ou le commerce », mais aussi « pour organiser des événements en marge des congrès et présenter la société ».

« C’est une pratique courante et parfaitement légale [contrairement à la France, où le financement politique par les entreprises est interdit] : nous ouvrons nos débats à ces entreprises, qui participent en retour aux frais d’organisation de ces événements », explique, de son côté, Didrik de Schaetzen, le directeur de la communication de l’ALDE.

Dans un état d’esprit très bruxellois, où le rapport aux lobbys est beaucoup plus décomplexé qu’en France, le parti revendique son ouverture aux « parties prenantes ». « On a aussi des relations avec des ONG », s’empresse de souligner M. de Schaetzen, mais aucune n’a eu son rond de serviette au congrès de Madrid.


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