Le nouveau tarif prohibitif des vaccins Pfizer-BioNTech
Le Premier ministre bulgare vient de dévoiler l’état des négociations entre l’Union européenne et les Américains de Pfizer-BioNTech. En quatre mois seulement, le coût négocié de leurs vaccins pourrait augmenter de près de 26 %, pour atteindre 19,5 euros la dose. Un enjeu aussi crucial que celui du vaccin mérite-t-il d’être à la merci de financiers sans scrupule ?
Si la crise du Covid fait souffrir bon nombre d’entreprises de par le monde, il en est quelques-unes qui parviennent à tirer leur épingle du jeu. Le Premier ministre bulgare, Boyko Borissov, en marge d’un déplacement au sud de son pays, vient de lever le voile sur les négociations entre l’Union européenne et Pfizer-BioNTech. Et c’est peu dire que les prix s’envolent : les deux sociétés demandent désormais 19,5 euros par doses.
Le prix a de quoi faire bondir ; car le tarif initial était de 15,5 euros. Aujourd’hui, les quelque 900 millions de doses négociées le seraient à un prix unitaire de 19,5 euros. Le montant de la facture s’élèverait alors à 17,5 milliards d’euros pour l’UE. Interrogé par l’agence de presse Reuters, un responsable des négociations de l’UE a bien confirmé le tarif évoqué par l’homme politique bulgare, en précisant tout de même que “les négociations n’étaient pas encore terminées”. Nous ne sommes donc pas à l’abri d’une éventuelle augmentation supplémentaire.
La sortie du Premier ministre bulgare met à nouveau à mal la politique de confidentialité de l’Union européenne vis-à-vis des citoyens. Les États membres ont consigne de ne rien dévoiler de l’état des négociations. Une opacité voulue – presque scandaleuse –, car elle prive les citoyens d’une information pourtant nécessaire à la compréhension des enjeux. Heureusement, en décembre dernier, la secrétaire d’État belge Eva De Bleeker a partagé, via Twitter, un tableau des différents prix négociés par l’Union européenne… peu de temps avant que ledit tweet ne soit supprimé. Pfizer-BioNTech, dont le vaccin était affiché au prix de 12 euros, y figurait déjà parmi les vaccins les plus chers, derrière celui de Moderna. Reuters avait par la suite rectifié le montant affiché : la dose était désormais à 15,5 euros l’unité.
La pandémie, une opportunité en or pour Pfizer
Les entreprises Pfizer-BioNTech ne s’en cachent même pas : elles ont trouvé la poule aux œufs d’or et entendent bien la faire pondre autant que possible. Interrogé lors d’une conférence virtuelle sur la santé mondiale organisée par la banque Barclays, Frank A. D’Amelio, directeur financier et vice-président exécutif de l’approvisionnement mondial de Pfizer, a ainsi déclaré que sa société "anticipait une "opportunité significative" pour son vaccin du point de vue des tarifs, alors que nous passons d’une situation pandémique à une situation endémique". Les millions de personnes contaminées dans le monde et les proches des personnes décédées apprécieront ce qualificatif d’“opportunité”.
Les deux entreprises ont conscience de leur force sur le marché. En France, un sondage Odoxa-Backbone Consulting pour Franceinfo et Le Figaro, publié jeudi 8 avril, relevait que 70 % des personnes interrogées avaient confiance dans le vaccin Pfizer-BioNtech. À l’inverse, AstraZeneca faisait peur, un pourcentage similaire de gens n’en voulaient pas. D’un point de vue financier, pourtant, le vaccin du groupe pharmaceutique suédo-britannique est le moins cher du marché, et de loin. Il ne coûte — pour l’instant — que 1,78 euro par dose. Soit plus de dix fois moins que Pfizer-BioNtech.
Le site Business AM a relayé une enquête à l’initiative de la People’s Vaccine Alliance. Le sondage, réalisé par une équipe d’épidémiologistes, de virologues et de spécialistes des maladies infectieuses, inquiète : il faudrait un an, voire moins, avant que la première génération de vaccins contre le Covid-19 devienne inefficace – sans compter les ajustements, nécessaires.
Le vaccin anti-Covid devrait rapporter environ 15 milliards de dollars de revenus à Pfizer en 2021. Le groupe américain a certainement vu, dans cette enquête, une “opportunité”. On comprend mieux désormais ce qui pousse le gouvernement français à promouvoir l’AstraZeneca, bien moins coûteux.